(retrouvez cet article sur : Le Portail des PME, paru le Lundi 11 Octobre 2010 11:26)
Aborder la question du recrutement implique d’évoquer l’une des phases les plus importantes pour une embauche tant pour l’employeur que pour le salarié : la période d’essai. Avant juin 2008, cette dernière ne faisait l’objet d’aucune mesure législative, sauf quelques rares dispositions spécifiques (relatives aux contrats à durée déterminée, VRP, etc.). De ce fait, son existence et sa durée étaient exclusivement régies par les conventions collectives et/ou le contrat de travail. Son régime juridique était essentiellement délimité par la Cour de cassation.
Devant cette lacune, la période d’essai a alors fait l’objet d’un encadrement législatif opéré par la loi portant modernisation du marché du travail (loi n°2008-596 du 25 juin 2008) et son régime fait désormais l’objet des articles L.1221-19 et suivants du Code du travail.
Ce nouveau régime est applicable pour tous les contrats de travail conclus à partir du 26 juin 2008, date d’entrée en vigueur de la loi précitée.
Les apports majeurs de cette loi sont :
– que la période d’essai doit faire l’objet d’une clause dans le contrat de travail ou la lettre d’engagement préalablement à leur exécution ;
– que la période d’essai a une durée maximale ;
– que la rupture doit respecter un délai de prévenance.
Ne seront abordés ci-après que les points essentiels du nouveau régime de la période d’essai souvent oubliés par les employeurs et pouvant engendrer de nombreux litiges…
I – Finalité de la période d’essai : évaluation et appréciation
La loi du 25 juin 2008 vient poser que « La période d’essai permet à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d’apprécier si les fonctions occupées lui conviennent ».
La période d’essai se distingue ainsi de la période probatoire (période à laquelle peut être soumis le salarié à l’occasion d’un changement de poste) ou encore du test professionnel (se situant avant la conclusion du contrat de travail).
Il est donc rappelé que même si les règles du droit commun du licenciement (pour un CDI) ou de la résiliation (pour un CDD) ne lui sont pas applicables, la période d’essai intervient pendant le contrat de travail et est de ce fait soumise aux règles le régissant (application du droit disciplinaire, interdiction des discriminations, droit à la rémunération, respect des statuts protecteurs, etc.).
II – Condition de mise en œuvre de la période d’essai : l’exigence d’une clause
Venant confirmer les solutions antérieurement données par la Cour de cassation, la loi vient préciser que la période d’essai doit être convenue entre l’employeur et le salarié et ce, même en présence d’une convention collective la prévoyant et à laquelle fait référence le contrat de travail.
Cependant, à la différence du régime antérieur, la loi de 2008 vient imposer que ladite période d’essai doit être prévue par une clause au sein de la lettre d’engagement ou du contrat de travail.
De ce fait, dès le premier jour d’exécution du contrat de travail, la nécessité de la rédaction d’une clause prévoyant la période d’essai implique la conclusion préalable du contrat de travail ou de la lettre d’engagement. La sanction pour l’employeur peu diligent est l’embauche définitive du salarié avec toutes les conséquences que cela implique comme par exemple le respect des règles relatives au licenciement…
III – Durée et renouvellement de la période d’essai : des limites clairement posées
Toujours dans une logique de clarification, la loi est venue imposer des durées maximales obligatoires applicables à la période d’essai.
Ainsi, pour le contrat de travail à durée indéterminée la période d’essai peut avoir une durée maximale :
– pour les ouvriers et les employés, de 2 mois ;
– pour les agents de maîtrise et les techniciens, de 3 mois ;
– pour les cadres, de 4 mois.
Pour ce qui est relatif au renouvellement, la loi dispose que la période d’essai peut être renouvelée une fois si cela est prévu par une clause au sein de la lettre d’engagement ou du contrat de travail et si un accord de branche étendu le prévoit. Cet accord fixe les conditions et les durées de renouvellement.
Selon la loi, les durées légales ont un caractère impératif, ce qui signifie qu’elles prévalent sur les accords collectifs ou de branches. Cependant certains aménagements ont été prévus.
Il faut donc retenir l’apport majeur de la loi fixant une durée maximale de la période d’essai et ne pas omettre que son renouvellement ne sera pas possible si l’entreprise n’est pas couverte par une convention collective de branche étendue le prévoyant expressément, cela s’analyserait alors en une embauche définitive.
IV – Rupture lors de la période d’essai : respect du délai de prévenance
La loi n’a rien changé au principe même de la période d’essai qui demeure la libre rupture.
La nouveauté est l’obligation de respecter un délai de prévenance, sorte de délai de préavis compris dans la période d’essai, renouvellement compris, tant par l’employeur que le salarié.
Il est ainsi prévu que lorsque l’employeur décide de rompre le contrat lors de la période d’essai, pour les contrats stipulant une période d’essai d’au moins une semaine, le salarié est prévenu dans un délai qui ne peut être inférieur à :
– 24 heures en deçà de 8 jours de présence ;
– 48 heures entre 8 jours et un 1 mois de présence ;
– 2 semaines après 1 mois de présence ;
– 1 mois après 3 mois de présence.
La sanction du non respect de ce délai par l’employeur n’a pas été prévue par le législateur. Elle pourrait s’analyser en un licenciement ou ouvrir droit à des dommages et intérêts. Aucune décision des Cours ou tribunaux n’a encore été rendue à ce jour quant à ce nouveau régime…
Ainsi, pour procéder à la rupture du contrat de travail pendant la période d’essai, il est désormais fortement conseillé d’en informer le salarié par écrit (lettre remise en main propre contre décharge ou envoi d’une lettre recommandée avec avis de réception) et ce dans le respect du délai de prévenance nouvellement instauré.
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Maître Sabrina SAB